Sur le premier Commandement de Dieu
12ème Dimanche après la Pentecôte
(Premier sermon)
Sur le premier Commandement de Dieu
Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur et de toutes vos forces. (Deut., VI, 5.)
Pourquoi, M.F., le Seigneur nous fait-il un commandement de l'aimer de tout notre cœur : c'est-à-dire, sans partage, de la manière dont il nous a aimés lui-même ; de toute notre âme et de toutes nos forces ; en nous promettant une récompense éternelle, si nous y sommes fidèles, et une punition éternelle si nous y manquons ? Pour deux raisons : c'est 1) pour nous montrer la grandeur de son amour ; 2) que nous ne pouvons être heureux qu'en l'aimant et qu'enfin cet amour ne se trouve que dans l'accomplissement de ses Commandements. Oui, M.F., si tant de maux nous accablent dans ce monde, cela vient de ce que nous violons les commandements de Dieu ; puisqu'il nous dit lui-même : « Si vous gardez fidèlement mes commandements, je vous bénirai en toute manière ; mais si vous les transgressez, vous serez maudits en tout ce que vous ferez. » De sorte, M.F., que si nous voulons être heureux en ce monde, du moins, autant qu'il est possible de l'être, nous n'avons point d'autres moyens que d'observer fidèlement les commandements de Dieu ; et nous verrons que, tant que nous nous écarterons du chemin que les commandements de Dieu nous ont tracé, nous serons toujours malheureux, pour l'âme et pour le corps, dans ce monde et dans l'autre. Je vais donc vous montrer, M.F., que notre bonheur est attaché à notre fidélité à observer les commandements que le bon Dieu nous a faits.
I. – Si nous ouvrons les livres saints, M.F., nous y verrons que tous ceux qui se sont fait un devoir de bien observer ce que les commandements de Dieu leur prescrivaient ont toujours été heureux, parce qu'il est très sûr que le bon Dieu n'abandonnera jamais celui qui se fait un devoir de faire tout ce qu'il lui commande. Notre premier père, Adam, nous en donne un bel exemple. Tant qu'il fut fidèle à observer les ordres du Seigneur, il fut heureux en toute manière : son corps, son âme, son esprit et tous ses sens n'avaient point d'autres penchants que vers Dieu ; les anges mêmes descendaient du ciel avec plaisir pour lui tenir compagnie. Ainsi aurait continué le bonheur de nos parents, s'ils avaient été fidèles à leurs devoirs ; mais ce moment mille fois heureux ne dura pas longtemps. Le démon, jaloux d'un tel bonheur, les eut bientôt perdus et privés de tous ces biens qui devaient durer toute l'éternité. Dès qu'ils eurent le malheur de transgresser les commandements du Seigneur, tout alla de travers pour eux : les chagrins, les maladies, la crainte de la mort, du jugement et d'une autre vie malheureuse, prirent la place de leur premier bonheur ; leur vie ne fut plus qu'une vie de larmes et de douleurs. Le Seigneur dit à Moïse : « Dis à mon peuple que, s'il est fidèle à observer mes commandements, je le comblerai de toutes sortes de bénédictions ; mais que s'il ose les transgresser, je l'accablerai de toutes sortes de maux. » Le Seigneur dit à Abraham : « Parce que vous êtes fidèles à garder mes commandements, je vous bénirai en tout ; je multiplierai vos enfants comme les grains de sable qui sont au bord de la mer. Je bénirai tous ceux qui vous béniront ; je maudirai tous ceux qui vous maudiront ; de votre race naîtra le Sauveur du monde. » Il fit dire à son peuple lorsqu'il était prêt à entrer dans la Terre promise : « Les peuples qui habitent cette terre ont commis de grands péchés ; c'est pourquoi je veux les chasser pour vous mettre à leur place. Mais prenez bien garde de ne pas violer mes commandements. Si vous êtes fidèles à les observer, je vous bénirai en tout et partout. Lorsque vous serez dans vos champs, dans vos villes et dans vos maisons, je bénirai vos enfants, qui vous aimeront, vous respecteront, vous obéiront et vous donneront toutes sortes de consolations. Je bénirai vos fruits et vos bestiaux. Je commanderai au ciel de vous donner la pluie dans le temps convenable, autant qu'il en faudra pour arroser vos terres et vos prés : tout vous réussira. » Dans, un autre endroit, il leur dit : « Si vous gardez fidèlement mes commandements, je veillerai sans cesse à votre conservation ; vous serez sans crainte dans vos maisons ; j'empêcherai que les bêtes féroces vous nuisent, vous dormirez en paix : rien ne pourra vous troubler. Je serai toujours au milieu de vous. Je marcherai avec vous. Je serai votre Dieu et vous serez mon peuple. » Plus loin, il dit à Moise : « Dis à mon peuple que s'il observe bien mes lois, je le délivrerai de tous ces maux qui l'accablent. » Et le Saint-Esprit nous dit lui-même « que celui qui a le bonheur de bien garder les commandements du Seigneur est plus heureux que s'il possédait toutes les richesses de la terre. » Dites-moi, auriez-vous jamais pensé que le bon Dieu eût tant à cœur de nous faire garder ses commandements, et qu'il nous promît tant de biens si nous sommes assez heureux que de les bien observer ? Vous conviendrez avec moi que nous devons faire consister tout notre bonheur à garder fidèlement ses commandements. Pour mieux vous convaincre, M.F., que, dès que nous transgressons les commandements de Dieu, nous ne pouvons être que malheureux, voyez ce qui se passa à l'égard de David. Tant qu'il fut fidèle à marcher dans le chemin que les commandements de Dieu lui avaient tracé ; tout alla bien pour lui : il était aimé, respecté et écouté de ses voisins. Mais dès l'instant qu'il voulut quitter d'observer les commandements de Dieu, de suite, son bonheur finit, et toutes sortes de maux lui tombèrent dessus. Les troubles, les remords de sa conscience prirent la place de cette paix et de ce calme dont il jouissait ; les larmes et la douleur furent son pain de tous les jours. Un certain jour qu'il gémissait tant sur ses péchés, on vint lui dire que son fils Amnon avait été poignardé dans son ivresse par son propre frère Absalon. Absalon chercha même à détruire son père, à lui ôter la vie pour régner à sa place ; David fut forcé d'aller se cacher dans les forêts pour éviter la mort. La peste lui enleva un nombre presque infini de sujets. Si vous allez plus loin, voyez Salomon : tant qu'il fut fidèle à garder les commandements de Dieu, il était le miracle du monde ; sa réputation s'étendait jusqu'à l'extrémité de la terre, puisque la reine de Saba vint de si loin, pour être témoin des merveilles que le Seigneur opérait en lui ; mais nous voyons que, dès qu'il eut le malheur de ne plus suivre les commandements de Dieu, tout alla mal pour lui. Après tant de preuves tirées de l'Écriture sainte, vous conviendrez avec moi, M.F., que tous nos maux ne viennent que de ce que nous n'observons pas fidèlement les commandements de Dieu, et que, si nous voulons espérer quelque bonheur et quelque consolation en ce monde, (du moins autant qu'il est possible d'en avoir, puisque ce monde n'est qu'un tissu de maux et de douleurs), le seul moyen de nous procurer ces biens, c'est de faire tout ce que nous pourrons pour plaire à Dieu en faisant ce qu'il nous ordonne par ses commandements. Mais si nous passons de l'Ancien Testament au Nouveau, les promesses ne sont pas moins grandes. Au contraire, nous voyons que Jésus-Christ nous les fait toutes pour le ciel, parce que rien de ce qui est créé n'est capable de contenter le cœur d'un chrétien, qui n'est fait que pour Dieu qui seul peut le contenter. Jésus-Christ nous engage fort à mépriser les choses de ce monde pour ne nous attacher qu'aux choses du ciel, qui ne finissent jamais. Nous lisons dans l'Évangile que Jésus-Christ se trouvant un jour avec des personnes qui semblaient ne penser qu'aux besoins du corps, i1 leur dit : « Ne vous mettez pas tant en peine de ce que vous mangerez ni de quoi vous vous vêtirez. » Et pour bien leur faire comprendre que tout ce qui regarde le corps est fort peu de chose : « Considérez, leur dit-il, les lis des champs, ils ne filent ni ne prennent soin d'eux ; voyez comment votre Père céleste prend soin de les vêtir ; car je vous assure que Salomon dans toute sa richesse et sa force n'a jamais été si bien vêtu que l'un d'eux. Voyez encore les oiseaux du ciel, qui ne sèment ni ne moissonnent ; ni ne renferment rien dans leur grenier, voyez comment votre Père céleste a soin de les nourrir. Gens de peu de foi, n'êtes-vous pas plus qu'eux ?... Cherchez, avant tout, le royaume des cieux ; c'est-à-dire, observez fidèlement mes commandements, et tout le reste vous sera donné avec abondance. » Que voulons-nous dire par là, M.F. ? Qu'à un chrétien qui ne cherche qu'à plaire à Dieu et à sauver son âme, ce qui est nécessaire aux besoins du corps ne lui manquera jamais. – Mais, me direz-vous peut-être, quand nous n'avons rien, personne ne nous apporte rien. – D'abord, je vous dirai que tout ce que nous avons, nous le tenons de la bonté de Dieu, et rien de nous-mêmes. Mais, dites-moi, M.F., comment voulez-vous que le bon Dieu fasse des miracles pour nous ? Serait-ce parce qu'il y en a quelques-uns qui osent porter leur incrédulité et leur impiété jusqu'à vouloir croire que le bon Dieu n'existe pas, c'est-à-dire qu'il n'y a point de Dieu ? parce que d'autres, moins impies, sans être moins coupables, disent que le bon Dieu ne fait pas attention à ce qui se passe sur la terre, que le bon Dieu ne se mêle pas de si peu de chose ? et enfin, parce que d'autres ne veulent pas convenir que cette grande Providence est attachée à l'observance des commandements de Dieu et qu'ils comptent pour tout sur leur travail et leurs soins ? (ce qu'il me serait bien facile de vous prouver par vos travaux du dimanche, qui montrent véritablement que vous ne comptez rien sur Dieu, mais tout sur vous et sur votre travail ) Il y en a cependant qui croient à cette grande Providence, mais qui lui mettent une barrière impénétrable par leurs péchés. Voulez-vous, M.F., éprouver la grandeur de la bonté de Dieu pour ses créatures ? faites-vous un devoir de bien observer tout ce que les commandements vous ordonnent, et vous serez étonnés de voir combien le bon Dieu prend soin de ceux qui ne cherchent qu'à lui plaire. Si vous en voulez voir les preuves, M.F., ouvrez les livres saints et vous en serez parfaitement convaincus. Nous lisons dans l'Écriture sainte que le prophète Élie, fuyant la persécution de la reine Jézabel, alla se cacher dans un bois. Étant là, dépourvu de tout secours humain, le Seigneur le laissera-t-il mourir de misère ? Non, certainement, M.F., le Seigneur, du haut du ciel, ne manque pas d'avoir les yeux sur son fidèle serviteur. De suite, il lui envoie un ange du ciel pour le consoler et lui porter tout ce qu'il lui fallait pour se nourrir: Voyez le soin que le Seigneur prend de nourrir la veuve de Sarepta. Il dit à son prophète : « Va trouver cette bonne veuve, qui me sert et observe mes commandements, avec fidélité ; tu multiplieras sa farine, crainte qu'elle ne souffre. » Voyez comment il commande à un autre prophète Habacuc d'aller porter à manger aux trois enfants qui étaient dans la fournaise de Babylone. Si vous passez de l'ancienne loi à la nouvelle, les merveilles que le bon Dieu opère pour ceux qui ont soin de bien observer ses commandements, ne sont pas moins grandes. Voyez comment le bon Dieu nourrit des milliers de personnes avec cinq pains et deux poissons ; cela n'est pas difficile à comprendre, puisqu'ils cherchaient, premièrement, le royaume des cieux et le salut de leur âme en suivant Jésus-Christ. Voyez comment il prend soin de nourrir un saint Paul ermite, pendant quarante ans, par le ministère d'un corbeau ; preuve bien claire que le bon Dieu ne perd jamais de vue ceux qui l'aiment, pour leur fournir tout ce qui leur est nécessaire. Lorsque saint Antoine alla voir saint Paul, le bon Dieu lui envoya un double repas : Ô mon Dieu ! que vous aimez ceux qui vous aiment ! que vous avez peur qu'ils souffrent ! Dites-moi, M.F., qui commanda à ce chien d'aller chaque jour porter la petite provision à saint Roch dans un bois. Qui commanda à cette biche d'aller tous les jours donner son lait à l'enfant de Geneviève de Brabant dans son désert ? N'est-ce pas le bon Dieu, M.F. ? Et pourquoi, M.F., est-ce que le bon Dieu prend tant de soins de nourrir tous ces saints, sinon parce qu'ils étaient fidèles à observer tous les commandements qu'il leur donnait ? Oui, M.F., nous pouvons dire que les saints faisaient consister tout leur bonheur à observer les commandements de Dieu, et qu'ils auraient mieux aimé souffrir toutes sortes de tourments que de les violer ; nous pouvons dire aussi que tous les martyrs n'ont été martyrs que parce qu'ils n'ont pas voulu violer les commandements de Dieu. En effet, M.F., demandez à sainte Reine, cette jeune vierge, pourquoi elle a tant enduré de tourments, ce qui lui fut d'autant plus sensible que ce fut son père qui fut son bourreau ? Il la fit pendre par ses cheveux à un arbre où il là fit frapper de verges jusqu'à ce que son pauvre petit corps innocent ne fût qu'une plaie. Après ces cruautés, qui firent frémir même les païens qui en furent témoins, il la fit conduire en prison, dans l'espérance qu'elle ferait ce qu'il lui commandait. La voyant inébranlable, il la fit ramener auprès de l'arbre, et ordonnant qu'on l'attachât comme la première fois par les cheveux, il la fit écorcher tout en vie. Quand la peau fut séparée de son corps, il la fit jeter, dans une chaudière d'huile bouillante, où il la regardait impitoyablement brûler. Si vous me demandez, M.F., pourquoi elle supporta tant de cruautés ? ah ! M.F., le voici. C'est qu'elle ne voulut pas transgresser le sixième commandement de Dieu, qui défend toute impureté. Pourquoi est-ce que la chaste Suzanne ne voulut pas consentir aux désirs de ces deux infâmes vieillards et qu'elle préféra plutôt la mort ? N'est-ce pas pour la même raison ? Qui fut la cause que le chaste Joseph fut décrié, calomnié auprès de Putiphar, son maître, et conduit en prison ? n'est-ce pas encore pour la même raison ? Pourquoi est-ce que saint Laurent se laissa coucher sur un brasier de charbons allumés ? N'est-ce pas parce qu'il ne voulut pas transgresser le premier commandement de Dieu, qui nous ordonne de n'adorer que Dieu et de l'aimer plus que nous-mêmes ? Oui ; M.F., si nous parcourons un peu les livres où sont renfermés les actions des saints, nous y voyons des exemples admirables et étonnants de leur fidélité à observer les commandements de Dieu, et nous voyons qu'ils ont préféré souffrir tout ce que les bourreaux ont pu inventer, plutôt que d'y manquer. Nous lisons dans l'histoire des martyrs du Japon, que l'empereur fit arrêter, dans un même endroit, vingt-quatre chrétiens ; à qui l'on fit souffrir tout ce que la rage des païens put leur inspirer. Les martyrs se disaient les uns aux autres : « Prenons bien garde de ne pas violer les commandements de Dieu pour obéir à ceux de l'empereur ; prenons courage, le ciel vaut bien quelques souffrances qui ne durent que quelques moments. Espérons fermement, et le bon Dieu, pour qui nous voulons souffrir, ne nous abandonnera pas. » Lorsqu'on les eut conduit dans le lieu où l'on devait les interroger, celui qui les avait menés faisant l'appel et croyant qu'il en manquait, cria à haute voix : « Mathieu ? où est Mathieu ? » Un soldat, qui, depuis longtemps, désirait se faire connaître pour chrétien, s'écrie : « Me voici, qu'importe, d'ailleurs, dit-il, la personne, je m'appelle aussi Mathieu et je suis chrétien comme lui. » Le juge, tout en fureur, lui demanda s'il le disait tout de bon. « Oui, répondit le soldat, il y a longtemps que je professe la religion chrétienne, j'espère ne jamais la quitter ; je ne désire que le moment de la manifester à l'extérieur. » De suite, le juge le fit mettre au nombre des martyrs. Il en eut tant de plaisir, qu'il en mourut de joie, avant de mourir dans les tourments. Parmi ce nombre, il y avait un enfant de dix ans. Le juge, le voyant si jeune, ne voulut pas, pendant quelque temps, le mettre sur la liste de ceux qui devaient mourir pour Jésus-Christ. Cet enfant était inconsolable de se voir privé de ce bonheur ; il protesta si fort que jamais il ne changerait et qu'il mourrait dans cette religion, il fit tant, qu'il força, pour ainsi dire, le juge à le mettre au nombre des martyrs. Il en eut une si grande joie, qu'il semblait ne pouvoir plus se posséder ; il voulait toujours être le premier, toujours répondre pour tous ; il aurait voulu avoir le cœur de tous les hommes pour les sacrifier tous à Jésus-Christ. Un seigneur païen, ayant appris que cet enfant était destiné à mourir avec les autres chrétiens, en fut touché de compassion. Il va lui-même trouver l'empereur, pour le prier d'avoir pitié de cet enfant, disant qu'il ne savait pas ce qu'il faisait. L'enfant, qui l'entendît, se tourna contre lui, en lui disant : « Seigneur, gardez votre compassion pour vous ; pensez seulement à vous faire baptiser et à faire pénitence, sans quoi, vous irez brûler avec les démons. » Ce seigneur, le voyant si bien résolu à la mort, le laissa. L'enfant, s'étant trouvé présent quand on leur lut leur sentence, qui portait qu'on leur couperait le nez et les oreilles, et qu'on les promènerait sur des charrettes par toute la ville, pour donner plus d'horreur de la religion chrétienne, et afin que les païens les accablassent d'injures ; ce pauvre petit eut une si grande joie, qu'il semblait qu'on venait de lui annoncer la possession d'un royaume entier. Les païens eux-mêmes étaient étonnés qu'un enfant si jeune eût tant de courage et éprouvât tant de joie de mourir pour son Dieu. Les bourreaux étant venus pour exécuter les ordres de l'empereur, tous ces saints martyrs allèrent se présenter à leur bourreau pour se faire découper, avec autant de tranquillité et de joie que si on avait voulu les conduire dans une salle de festin. Ils se laissèrent couper le nez et les oreilles avec la même tranquillité que si on leur avait coupé un morceau de leur habit. Leur pauvre corps était tout couvert de sang, ce qui fit horreur même aux païens qui en furent témoins. On entendait ceux-ci s'écrier de temps en temps : « Ô quelle cruauté ! ô quelle injustice de faire tant souffrir des personnes qui n'ont point fait de mal ! Voyez-vous, se disaient-ils les uns aux autres, voyez quel courage leur donne cette religion qu'ils professent. » Toutes les fois qu'on les interrogeait, ils ne répondaient rien, sinon qu'ils étaient chrétiens et qu'ils savaient souffrir et mourir, mais que jamais ils ne violeraient les commandements de leur Dieu, parce qu'ils faisaient consister tout leur bonheur à y être fidèles. Hélas ! ces pauvres martyrs, après qu'on les eût promenés par la ville sur ces charrettes, leur corps était tout couvert de sang ; les pierres étaient toutes ensanglantées et la terre était toute rouge du sang qui coulait, avec abondance de leurs plaies. Comme leur sentence portait qu'ils devaient mourir chacun sur une croix, celui qui les avait conduits pour la première fois, reconnut ces chrétiens. Ce qui le toucha grandement, ce fut cet enfant de dix ans. Il s'approcha de lui, en lui disant : « Mon enfant, vous êtes bien jeune, c'est bien dommage de mourir dans un âge si peu avancé ; si vous voulez, je me charge d'obtenir votre grâce auprès de l'empereur, et bien plus, une grande récompense : » Cet enfant, l'entendant parler de la sorte, se mit à rire en lui disant qu'il le remerciait bien ; mais de garder toutes ses récompenses pour lui-même, puisqu'il n'avait point d'espérance pour l'autre vie ; mais que, pour lui, il méprisait tout cela comme étant trop peu de chose ; que toute sa crainte était de ne pas avoir le bonheur de mourir, comme les autres martyrs, pour Jésus-Christ. Sa mère, qui était témoin de tout cela, quoique chrétienne, était inconsolable de voir mourir son enfant sur une croix. Ce pauvre petit, voyant sa mère si désolée, l'appela auprès de lui, en lui disant qu'il était peu édifiant pour une mère chrétienne de tant pleurer la mort d'un enfant martyr, comme si elle ne connaissait pas tout le prix d'un tel sacrifice ; qu'elle devrait, au contraire, l'encourager et remercier le bon Dieu d'une telle grâce. Cet enfant de bénédiction, un moment avant de mourir, dit des choses si belles et si touchantes sur le bonheur de ceux qui meurent pour Jésus-Christ, que les païens aussi bien que les chrétiens, tous fondaient en larmes. Lorsqu'on l'approcha de sa croix, avant d'y être attaché, il embrassa cette croix, il la baisa, il l'arrosa de ses larmes, tant il eut de joie de voir que véritablement il allait mourir pour son Dieu. Quand, ils furent tous sur leurs croix, l'on entendit une troupe d'anges qui chantaient le Laudate pueri Dominum, avec leur musique céleste ; ce qui fut entendu de tous les païens. Quel spectacle ! M.F., le ciel dans l'admiration !... la terre dans l'étonnement !... les assistants dans les larmes, et les martyrs dans l'allégresse, qui quittent la terre, c'est-à-dire toutes les souffrances et les misères de la vie, pour aller prendre possession d'un bonheur qui durera autant que Dieu même... Eh bien ! M.F., dites-moi, qui porta tous ces martyrs à endurer tant de tourments ? si ce n'est pour ne pas vouloir violer les commandements de Dieu ? Quelle honte pour nous, M.F., lorsque Jésus-Christ nous confrontera avec eux ; nous, que, si souvent, un simple respect humain, un maudit qu'en dira-t-on, fait rougir, ou plutôt nous fait désavouer que nous sommes chrétiens, pour nous mettre du nombre des renégats.
II. – Mais examinons cela, M.F., un peu plus de près, et nous verrons que, si le bon Dieu nous ordonne de garder fidèlement ses commandements, ce n'est que pour notre bonheur. Il nous dit lui-même qu'ils sont faciles à accomplir, et que, si nous les accomplissons, nous y trouverons la paix de nos âmes. Si, dans le premier commandement, le bon Dieu nous ordonne de l'aimer, de le prier et de ne nous attacher qu'à lui, et si nous devons le prier soir et matin, et souvent dans la journée, dites-moi, M.F., n'est-ce pas là le plus grand de tous les bonheurs pour nous, que le bon Dieu veuille bien nous permettre de nous présenter tous les matins devant lui, pour lui demander les grâces qui nous sont nécessaires pour passer saintement la journée ? N'est-ce pas une grâce qu'il nous fait, n'est-ce pas cette grâce, que le bon Dieu nous donne le matin, qui rend toutes nos actions méritoires pour le ciel ? n'est-ce pas ce qui nous les fait trouver moins dures ? Si ce même commandement nous ordonne de n'aimer que Dieu et de l'aimer de tout notre cœur, n'est-ce pas parce qu'il sait qu'il n'y a que lui qui puisse nous contenter et nous rendre heureux en ce monde ? Voyez une maison, où tous ne vivent que pour Dieu : n'est-ce pas un petit paradis ? Vous conviendrez donc avec moi, M.F., que ce commandement n'a rien que de doux et de consolant pour celui qui a le bonheur de l'observer avec fidélité. Si nous passons au deuxième, qui nous défend toute sorte de jurements, de blasphèmes, d'imprécations et de malédictions, et toute sorte de colère, en nous recommandant la douceur, la charité, et la prévenance pour tous ceux qui nous environnent : dites-moi, M.F., qui sont ceux qui sont le plus heureux, ou de ceux qui se livrent à tous ces excès de colère, d'emportements et de malédictions, ou de ceux qui, dans tout ce qu'ils font ou disent, montrent cette égalité d'humeur, cette bonté, et qui s'étudient continuellement à faire la volonté des autres ? Nous voyons donc que ce commandement ne contribue qu'à nous rendre heureux nous-mêmes et ceux qui sont avec nous. Si nous venons au troisième, qui nous ordonne de passer saintement le jour du dimanche, en cessant toute sorte de travail manuel pour ne nous occuper que de ce qui regarde le service de Dieu et le salut de notre âme : dites-moi, M.F., n'est-ce pas pour notre bien ; puisque nous cessons de travailler pour ce monde qui n'est rien ? puisque nous ne sommes qu'un instant sur la terre, et qu'en priant ou faisant de bonnes œuvres, nous nous ramassons pour le ciel un trésor que nous ne quitterons jamais, et, par là, nous attirons sur notre travail de la semaine toute sorte de bénédictions ? N'est-ce pas déjà un moyen pour notre bonheur ? Ce même commandement nous ordonne encore d'employer ce saint jour à pleurer nos péchés de la semaine, de nous en purifier par la vertu des sacrements : n'est-ce pas, M.F., nous forcer, pour ainsi dire, à ne chercher que notre bien, notre bonheur, et notre félicité éternelle ? Ne sommes-nous pas plus contents lorsque nous avons bien passé le saint jour du dimanche à prier le bon Dieu, que si nous avons eu le malheur de le passer dans les plaisirs, les jeux et les débauches ? Le troisième commandement n'a donc rien que de consolant et d'avantageux pour nous. Si nous passons au quatrième, qui ordonne aux enfants d'honorer leurs parents, de les aimer, de les respecter et de leur souhaiter et procurer tous les biens dont ils sont capables : dites-moi, n'est-ce pas une chose juste et raisonnable ? Des parents qui ont tant fait pour leurs enfants ! n'est-il pas juste que ces mêmes enfants les aiment et leur donnent toutes les consolations dont ils sont capables ? Si ce commandement était bien observé, ces familles ne seraient-elles pas un petit paradis par ce respect, cet amour que les enfants auraient pour leurs parents ! Si ce même commandement ordonne aux parents d'avoir bien soin des âmes de leurs enfants, et leur dit qu'un jour ils en rendront un compte rigoureux, n'est-ce pas une chose juste ; puisque ces âmes ont tant coûté à Jésus-Christ pour les sauver, et qu'elles seront la joie et la gloire de leurs parents pendant toute l'éternité ? Si ce même commandement ordonne aux maîtres et maîtresses d'avoir grand soin de leurs domestiques, de les regarder comme leurs enfants, ces maîtres ne sont-ils pas trop heureux de pouvoir aider à sauver des âmes qui ont tant coûté de tourments à un Dieu fait homme pour nous ? Disons mieux, M.F. : si ce commandement était bien observé, le ciel ne descendrait-il pas sur terre par la paix et le bonheur que nous y goûterions ? Si nous passons au cinquième qui nous défend de faire tort à notre prochain dans ses biens, sa réputation et sa personne, n'est-ce pas une chose bien juste, puisque nous devons les aimer comme nous-mêmes, et une chose, en même temps, bien avantageuse pour nous, puisque Jésus-Christ nous dit que jamais le bien d'autrui n'entrera dans le ciel ? Vous voyez que ce commandement n'a rien de dur, puisque par lui nous nous assurons le ciel. Si nous passons au sixième commandement, qui nous défend toute impureté dans les pensées, les désirs et les actions ; n'est-ce pas pour notre paix et notre bonheur que le bon Dieu nous défend toutes ces choses ? Si nous avons le malheur de nous livrer à quelques-uns de ces mauvais péchés infâmes, votre pauvre âme n'est-elle pas comme dans un enfer ? n'êtes-vous pas tourmentés et le jour et la nuit ? D'un autre côté, votre corps et votre âme ne sont-ils pas destinés à être la demeure de la Très-Sainte Trinité ; ne doivent-ils pas, dis-je, aller passer une éternité avec les anges, auprès de Jésus-Christ qui est la pureté même ? Vous voyez donc que ce commandement ne nous est donné que pour notre bien et notre repos, même dès ce monde. Si le bon Dieu nous dit, M.F., par la voix de son Église : « Je vous commande de ne jamais laisser passer plus d'un an, sans vous confesser ; » dites-moi, ce commandement n'est-il pas pour nous montrer la grandeur de l'amour de Dieu pour nous ? Dites-moi, quand même l'Église n'aurait pas fait ce commandement, peut-on vivre tranquille avec le péché dans le cœur et le ciel fermé pour nous, étant exposés à chaque instant à tomber en enfer. Si le bon Dieu nous commande de le recevoir à Pâques, hélas ! M.F., une âme peut-elle bien vivre, ne faisant qu'un repas tous les ans ? Mon Dieu, que nous connaissons peu notre bien, notre bonheur ! Si l'Église nous ordonne de nous priver de manger de la viande, de jeûner certains jours ; est-ce une chose injuste ; puis qu'étant pécheurs, nous devons nécessairement faire pénitence dans ce monde ou dans l'autre ? Et n'est-ce pas, en cela, changer contre de petites peines ou privations des maux bien rigoureux dans l'autre vie ? Ne conviendrez-vous pas avec moi, M.F., que si le bon Dieu nous a fait des commandements, nous oblige de les observer, cela n'est que pour nous rendre heureux dans ce monde et dans l'autre ? De sorte, M.F., que si nous voulons espérer quelques consolations et quelques adoucissements dans nos misères, nous ne les trouverons qu'en observant avec fidélité les commandements de Dieu ; et, tant que nous les violerons, nous ne serons que malheureux, même dès ce monde. Oui, M.F., quand même une personne serait maîtresse de la moitié du monde ; si elle ne fait pas consister tout son bonheur à bien observer les commandements, ne sera que malheureuse. Voyez, M.F., lequel était le plus heureux de saint Antoine dans son désert, livré à toutes les rigueurs de la pénitence, ou de Voltaire, dans tous ses biens et ses plaisirs ; et, comme nous dit saint Paul, dans son abondance et sa crapule. Saint Antoine vit heureux, meurt content et, maintenant, jouit d'un bonheur qui ne finira jamais ; tandis que l'autre vit malheureux avec tous ses biens, meurt en désespéré, et maintenant, selon toute apparence, sans le juger, souffre comme un réprouvé. Pourquoi, M.F., cette grande différence ? c'est que l'un fait consister tout son bonheur à observer fidèlement les commandements de Dieu, et l'autre met tous ses soins à les violer et à les faire mépriser ; l'un, dans la pauvreté, est content ; et l'autre, dans l'abondance, est bien misérable ; ce qui nous montre, M.F., qu'il n'y a que Dieu seul qui puisse nous contenter et rien autre chose. Voyez le bonheur que nous avons si nous observons fidèlement les commandements de Dieu, puisque nous lisons dans l'Évangile que Jésus-Christ nous dit : « Celui qui observe mes commandements m'aime et celui qui m'aime sera aimé de mon Père ; nous viendrons en lui et nous y ferons notre demeure. » Quel bonheur peut être plus grand et quelle grâce plus précieuse ; puisque en gardant les commandements de Dieu, nous attirons en nous tout le ciel. Le saint roi David avait bien raison de s'écrier : « Ô mon Dieu, que ceux qui vous servent sont heureux ! » Voyez encore combien le bon Dieu bénit les maisons de ceux qui observent ses lois divines. Nous lisons dans l'Évangile que le père et la mère de saint Jean-Baptiste gardaient si bien les commandements que personne ne pouvait leur reprocher la moindre chose; aussi le bon Dieu, en récompense, leur donna un enfant qui fut le plus grand de tous les prophètes. Ce fut un ange qui vint du ciel, pour leur annoncer cette heureuse nouvelle. Ce fut même le Père éternel qui lui donna le nom de Jean, qui veut dire : enfant de bénédiction et de bonheur. A peine Jésus-Christ est-il conçu dans le sein de sa mère, qu'il va lui-même dans cette maison, pour y répandre toute sorte de bénédictions. Il sanctifia cet enfant, avant qu'il fût né, et remplit le père et la mère du Saint-Esprit. Voulez-vous, M.F., que le bon Dieu vous visite et vous comble de toute sorte de bénédictions ? tâchez de mettre tous vos soins à bien observer les commandements de Dieu, et tout ira bien chez vous. Nous lisons dans l'Évangile qu'un jeune homme demanda à Jésus-Christ ce qu'il fallait faire pour avoir la vie, Le Sauveur lui répondit : « Si vous voulez avoir la vie éternelle, gardez mes commandements avec fidélité. » Notre-Seigneur s'entretenant un jour avec ses disciples sur le bonheur de l'autre vie, dit que le chemin qui conduit au ciel est étroit, qu'il y en a bien peu qui le cherchent véritablement, et, parmi ceux qui le trouvent, bien peu qui soient dans cette route : « ce n'est pas tous ceux qui disent : Seigneur, Seigneur, qui seront sauvés ; mais seulement ceux qui font la volonté de mon Père en gardant mes commandements. Plusieurs me diront au jour du jugement : Seigneur, nous avons prophétisé en votre nom ; nous avons chassé les démons du corps des possédés et nous avons fait de grands miracles. Je leur répondrai : Retirez-vous de moi, ouvriers d'iniquité. Vous avez fait de grandes choses ; mais vous n'avez pas observé mes commandements ; je ne vous connais pas. » Jésus-Christ dit au disciple bien-aimé : « Soyez-moi fidèle jusqu'à la fin, et je vous donnerai la couronne éternelle. » Vous voyez donc, M.F., que notre salut est absolument attaché à l'observance des commandements de Dieu. Si vous avez quelque doute de savoir si vous serez sauvés ou damnés, prenez les commandements de Dieu et confrontez-les avec votre vie. Si vous voyez que vous marchez dans le chemin qu'ils vous ont tracé, ne vous mettez en peine que de persévérer ; mais, si vous vivez d'une manière tout opposée, vous aurez beau vous tourmenter, vous ne laisserez pas que d'être damnés.
III. – Nous disons que si nous voulons avoir la paix de l'âme, il faut garder les commandements de Dieu, parce que le Saint-Esprit nous dit que celui qui a une conscience pure est comme dans un festin continuel. Il est très certain, M.F., que celui qui vit selon les lois de Dieu est toujours content, et, bien plus, rien n'est capable de le troubler. Saint Paul nous dit qu'il est plus heureux et plus content dans sa prison, dans ses souffrances, ses pénitences et sa pauvreté que ses bourreaux ne le sont dans leur liberté, leur abondance et leur crapule ; que son âme est remplie de tant de joie et de consolation, qu'elle déborde de tous côtés. Sainte Monique nous dit qu'elle fut toujours contente quoiqu'elle fut souvent maltraitée par son mari, qui était un païen. – Saint Jean de la Croix nous dit qu'il avait coulé les jours les plus heureux de sa vie, là où il avait le plus souffert. « Mais, au contraire, nous dit le prophète Isaïe, celui qui ne vit pas selon les lois du Seigneur ne sera ni content ni heureux. Sa conscience sera semblable à une mer agitée par une furieuse tempête, les troubles et les remords le suivront partout. » Si ces personnes veulent vous dire qu'elles sont en paix, ne les croyez pas, parce qu'elles sont des menteurs ; parce que le pécheur n'aura jamais la paix. Voyez-en la preuve, M.F., dans Caïn. Dès qu'il eut le malheur d'avoir tué son frère Abel, son péché fut, toute sa vie, son bourreau, qui ne le quitta qu'à la mort pour le traîner en enfer. Voyez encore les frères de Joseph. Voyez même Judas : après avoir vendu son divin Maître, il fut si tourmenté, qu'il alla se pendre à un figuier, tant la vie lui était à charge. Nous lisons dans l'histoire qu'un jeune homme, dans un accès de fureur, tua son pauvre père. Son péché ne lui donna de repos ni jour, ni nuit. Il lui semblait entendre son père qui lui criait : « Ah ! mon fils, pourquoi m'as-tu égorgé. » Il alla lui-même se dénoncer pour qu'on le fît mourir, pensant que l'enfer ne serait pas plus rigoureux. Hélas ! M.F., si nous avons le malheur de ne pas garder les commandements de Dieu, jamais nous ne serons contents, même avec les plus grands biens. Voyez Salomon, etc. Mais, chose étrange, M.F., l'homme a beau être tourmenté et savoir les remèdes qu'il faut prendre pour avoir la paix avec son Dieu et avec lui-même, il aime mieux commencer son enfer que d'avoir recours aux remèdes que Jésus-Christ nous a donnés. Vous êtes malheureux, mon ami, pourquoi voulez-vous rester dans cet état ? Revenez à Jésus-Christ et vous retrouverez la paix de l'âme que vos péchés vous ont ravie.
IV. – Nous disons que si nous ne gardons pas les commandements de Dieu, nous serons malheureux tous les jours de notre vie. Voyez-en la preuve dans Adam. Dès qu'il eut péché, le Seigneur lui dit : « Parce que tu as violé mes lois, la terre, pour toi, sera maudite ; elle ne produira d'elle-même que des ronces et des épines. Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front, et cela, tous les jours de ta vie. » Voyez Caïn ; le Seigneur lui dit : « Caïn, le sang de ton frère crie vengeance, tu seras errant, vagabond et fugitif tous les jours de ta vie. » Voyez encore Saül... De sorte, M.F., que, dès que nous cessons de suivre ce que les commandements de Dieu nous ordonnent, nous devons nous attendre à toutes sortes de maux spirituels et temporels. Pères et mères, voulez-vous être heureux ? Commencez à bien observer les commandements de Dieu vous-mêmes, afin que vous puissiez vous donner pour modèles à vos enfants, et que vous puissiez toujours leur dire : « Faites comme moi. » Si vous voulez qu'ils fassent bien leur prière, donnez-leur-en l'exemple. Voulez-vous qu'ils soient bien modestes à l'église, donnez-leur l'exemple ; mettez-les à côté de vous. Voulez-vous qu'ils observent bien le saint jour du dimanche ? commencez vous-mêmes. Voulez-vous qu'ils soient charitables ? soyez-le vous-mêmes. Hélas ! M.F., si tant de maux nous accablent, n'en cherchons point d'autres raisons que la multitude des péchés que nous commettons, en transgressant les commandements de Dieu. Plaignons, M.F., ceux qui viendront quelques siècles après nous. Hélas ! ce sera bien plus mauvais encore. Voulons-nous, M.F., que Dieu cesse de nous châtier ? cessons nous-mêmes de l'offenser ; faisons comme les saints qui ont tout sacrifié plutôt que de violer ses saintes lois. Voyez un saint Barthélemy et une sainte Reine, qui ont été écorchés tout en vie, pour ne pas vouloir offenser Dieu. Voyez un saint Pierre et un saint André, qui ont été crucifiés sur une croix. Voyez toutes ces foules de martyrs qui ont enduré mille tourments pour ne pas transgresser les commandements. Voyez tous les combats qu'ont soutenus les saints Pères des déserts contre le démon et leurs penchants. Lorsque saint François d'Assise était sur une montagne pour prier, les habitants du voisinage vinrent lui demander de les délivrer, par ses prières, de quantité de bêtes féroces qui dévoraient tout ce qu'ils avaient. Ce saint leur dit : « Mes enfants, cela ne vient que de ce que vous avez violé les commandements de Dieu ; revenez à Dieu et vous serez délivrés. » En effet, aussitôt qu'ils eurent changé de vie, ils furent délivrés. De même, en finissant, disons que si nous voulons que nos maux spirituels et temporels finissent, finissons d'offenser le bon Dieu ; cessons de transgresser ses commandements. Cessez, M.F., de livrer votre cœur, votre esprit et peut-être même votre corps à l'impureté. Cessez, M.F., de fréquenter les jeux, les cabarets, les lieux de plaisirs. Cessez, M.F., les travaux du dimanche. Cessons de nous éloigner des sacrements. Cessons, M.F., de nous faire un jeu de violer les lois du jeûne et de l'abstinence ; quittons la route que suivent les païens, à qui les commandements ne sont pas connus. Cherchons, M.F., notre véritable bonheur qui ne peut se trouver qu'en Dieu seul, en accomplissant fidèlement les commandements. Cessons, M.F., de travailler à nous rendre malheureux pour l'éternité. Revenons à Dieu, M.F., et pensons que nous sommes chrétiens et que, par conséquent, nous devons combattre nos penchants et le démon ; fuir le monde et ses plaisirs, vivre dans les larmes, la pénitence et l'humilité. Disons comme le saint roi David : « Oui, mon Dieu ! je me suis éloigné de vos commandements par mes péchés ; mais, mon Dieu, aidez-moi, je reviendrai à vous par les larmes et la pénitence, et je marcherai tous les jours de ma vie dans la voie de vos commandements, qui me conduiront jusqu'à vous pour ne jamais vous perdre. » Heureux, M.F., celui qui imitera ce saint roi, qui, revenu à Dieu, ne le quitta jamais plus ! C'est là, M.F., ce que je vous souhaite.